Poursuivre le débat : Des animaux et des hommes
Des animaux et des hommes. Ceci signifie que je différencie les uns et les autres. Non pas que la différence fait qu’ils sont sans rapports les uns avec les autres, au contraire. En effet, nous sommes nous-mêmes, naturellement, des animaux humains qui par degrés plus ou moins constants se sont transformés en êtres humains ; ce développement se faisant concomitamment à ce que nous appelons culture, laquelle se fonde sur les capacités de l’homme à créer des concepts et des langages spécifiques pour les exprimer, manifester les conceptions qu’ils forgent.
Cela est une différence essentielle par rapport aux êtres du monde animal, et bien entendu végétal. Dans le même temps que cette faculté de concevoir va se développer la conscience de soi et de l’environnement basée, bien sûr, sur ce que nous enseignent nos sens, mais aussi, donc, les acquis et découvertes de la culture.
Ceci est une différence d’avec la nature naturelle animale. Par cette capacité de concevoir et la culture que nous produisons, l’une et l’autre se nourrissant, nous allons persister dans notre être, être humain culturel, au-delà de notre nature naturelle, sans la nier, mais en la transformant relativement en nous-mêmes et hors de nous-mêmes.
Dans ces processus nous avons eu et nous avons toujours à faire avec les grandes nécessités et principes de la vie naturelle, à savoir se conserver, en se nourrissant, se protégeant, nous perpétuer en nous reproduisant.
Pour répondre à la première nécessité nous devons nous nourrir, et pour cela consommer d’autres êtres naturels, végétaux ou/et animaux. En Europe, entre autre, existe un courant de pensée et de pratiques tendant à abolir la consommation de viande, pour des questions de santé, mais surtout éthiques : refus de tuer d’autres êtres vivants (mais les végétaux sont aussi du vivant…), ce qui posé comme principe peut tout à fait s’entendre même s’il n’a en tant qu’absolu aucun fondement autre que celui d’un affect comme l’amour symbiotique ou/et compassionnel, tout à fait respectable chez les individus qui l’expriment et le vivent, mais qui n’est pas tout, qui ne peut résumer à lui seul toute la réalité, même s’il en est une des composantes fondamentales.
A plusieurs égards cette conception et attitude, absolutisées, apparaissent comme irréalistes et même sur certains plans erronées. Elles présupposent qu’il n’y a pas de différence d’appréhension de la vie et de vécu entre les hommes et les animaux. Or nous avons vu brièvement ci-dessus qu’il n’en est rien, et même qu’il y a chez les animaux des différences d’évolution entre les espèces que certains veulent d’ailleurs nier, mais reconnaissant pourtant que les hommes devraient légiférer pour donner des « droits » aux animaux, ce en quoi ils reconnaissent implicitement que les humains sont aptes à réaliser cette tâche, justement par leur faculté conceptive, alors que les animaux en sont incapables par eux-mêmes, inaptes à légiférer pour réguler les relations animaux humains.
Lorsque j’écris cela ce n’est pas pour justifier de mauvais traitements qui seraient infligés aux animaux, au contraire, mais nos relations avec eux devraient être conduites par la raison, la modération et une affection appropriée, non des idées irréalistes qui sont d’ailleurs vite battues en brèche lorsqu’on observe régulièrement la nature naturelle, et que l’on voit par exemple au petit matin un rouge- gorge fondre sur un ver de terre et le gober en quelques dixièmes de seconde, ou que l’on voit un chat capturer une souris, ou que l’on a vu, en images cette fois, un lion pourchasser une gazelle, l’attraper et la tuer d’un coup de mâchoire derrière la nuque. Voilà la réalité de la vie et des réponses sans passion apportées à ses nécessités, une forme de « raison naturelle », si nous voulons conserver « raison » pour l’homme, avec le sens de faculté d’équilibrage à partir des concepts et du jugement qu’ils permettent.
Revenons donc à celle-ci pour penser la question des rapports entre hommes et animaux. Outre ce que nous avons déjà énoncé précédemment, on peut constater que dans certaines régions de la Terre les possibilités de subsistance par la nourriture autre que celle provenant des animaux sont rares, comme par exemple dans les pays arctiques, mais aussi en général difficiles dans tous les pays à climat froid où l’alimentation carnée est nécessaire, surtout lors d’efforts physiques violents ou/et soutenus. Il suffit de l’expérimenter pour le savoir.
Cela n’empêche pas que dans des conditions de vie plus favorables, moins pénibles physiquement, ce type d’alimentation à base de viande peut être grandement diminuée, voire supprimée pour certains, entre autre par choix éthique comme on l’a dit plus haut. Ici comme ailleurs la raison s’oppose au dogme.
Pour terminer je voudrais répondre à ceux qui croient qu’il n’y a pas de hiérarchie entre les espèces, arguant pour finir que l’homme n’a pas à se placer au-dessus des animaux. Mais il le fait et c’est sûrement parce qu’il a quelques facultés que n’ont pas les animaux, on a d’ailleurs vu que c’est lui qui pouvait donner des droits à ceux-ci et non pas l’inverse. Et l’on sait très bien que celui qui donne des droits est, ou se conçoit au moins, comme supérieur, et agit le plus souvent en conséquence1. D’ailleurs, même dans le domaine naturel il y a une forme de hiérarchie si l’on entend par là degré de domination, sans automatiquement donner à ces termes un sens péjoratif, voire contenant haine ou cruauté.. Ainsi, donc, dans la nature c’est le rouge-gorge qui mange le ver de terre, le chat qui mange la souris, le lion qui mange la gazelle. Et dans aucun de ces cas cela n’est le contraire. Il y a une hiérarchie, ou mieux dit des hiérarchies croisées ou parallèles entre les espèces. Faisons en sorte que la faculté qui fait notre spécificité et sûrement notre supériorité, peut-être transitoire, à savoir l’intelligence hominale avec la conscience, la raison et la volonté, soit réellement exercée et appliquée dans nos rapports avec les animaux, nos frères naturels, et bien sûr avec nos frères humains.2
Richard Glize
1Pour cela nous pensons que seul celui qui se donne à soi-même des droits, en fait des libertés, en conscience et raison, est réellement libre : « Homme libre »…
2Des considérations plus développées sur ces sujets philosophiques et anthropologiques se trouvent sur mon blog : mondesterriens.overblog.com