Europacity : l’arnaque du « capitalisme vert et durable »
Pendant que les bobos parisiens plantent trois salades en centre ville. Le capital poursuit son expansion, inexorablement. Destruction de 80 hectares de terres agricoles aux portes de Paris au programme d’une des projets les plus horribles du début du XXI siècle.
Revêtir une combinaison, des moufles et chausser des skis pour dévaler la même piste de neige artificielle pendant deux heures, en plein mois de juillet, sera bientôt possible aux portes de Paris. Plus exactement à 2 km du Bourget (Seine-Saint-Denis), où ont été pris les engagements de la COP21… Le projet compte aussi 2 700 chambres d’hôtel, 230 000 m2 de commerces, 20 000 m2 de restaurants, 50 000 m2 de lieux culturels, dont un «parc d’aventures». Une ville artificielle à la Dubaï s’étendra sur 80 ha, soit 112 terrains de football. Ou plutôt, sur les champs de six paysans, qui ont échappé au bétonnage et pratiquent une culture intensive de céréales. Jusqu’alors, sans possibilité de construire des logements du fait des nuisances sonores des aéroports, les rangées de maïs, blé et colza s’étendent comme une parenthèse champêtre dans un récit urbain. «La terre est tellement fertile que nous n’avons pas besoin d’arroser le blé, elle garde l’humidité», vante Dominique Plet, l’agriculteur le plus impacté par l’expropriation, qui y perd 30 ha. Il s’inquiète surtout pour son fils, qui aurait voulu prendre la relève. Deux centres commerciaux encerclent déjà les plantations : O’Parinor, situé à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), à 1,5 km du futur EuropaCity, et Aéroville, étalé sur Roissy-en-France (Val-d’Oise) et Tremblay (Seine-Saint-Denis), à tout juste 3 km du mégaprojet : il a ouvert ses portes il y a à peine deux ans et demi (Marianne, 21/05/2016).
Les opposants à EuropaCity ne désarment pas. Le collectif pour le Triangle de Gonesse (CPTG) a lancé il y a quelques jours une pétition en ligne contre la révision du plan local d’urbanisme (PLU) de la ville de Gonesse dont l’enquête publique a débuté le 29 mai. Celle-ci prévoit notamment de rendre constructibles les 300 ha de terres agricoles du Triangle « à vocation commerciale » permettant ainsi l’aménagement d’une zone d’aménagement concerté (ZAC) et la construction du méga complexe EuropaCity d’ici 2024. Les signataires sont ainsi invités à transmettre leur « avis négatif » au commissaire enquêteur.
Ce week-end, le compteur affichait plus de 600 personnes. Les usagers ont jusqu’au 30 juin pour consulter le dossier complet et participer à l’enquête publique.
Pétition en ligne : www.mesopinions.com/petition/nature-environnement/contre-projet-revision-plu-gonesse-mis/30764 (Le Parisien, 18/06/2017)
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé le plan local d’urbanisme du projet de centre commercial et de loisirs dans le Val d’Oise (95). Le maire de Gonesse va faire appel de la décision.
Le projet Europacity, suite.Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé le plan local d’urbanisme (PLU) de la ville de Gonesse. Ce document, voté en septembre 2017 par le conseil municipal, est indispensable à la construction de cet espace tant commercial (230.000 m²), que culturel (50.000 m²) et parc de loisirs (150.000 m²). Le tribunal explique avoir notamment estimé que le conseil municipal avait «commis une erreur manifeste d’appréciation en classant en zone à urbaniser 248 hectares de terres agricoles». «Cette urbanisation concerne des terres particulièrement fertiles, alors que les bénéfices escomptés, notamment en termes de créations d’emplois, invoqués par la commune de Gonesse, ne sont pas établis», poursuit le tribunal. «Nous contestons les moyens retenus par le tribunal administratif de Cergy et nous faisons appel de ce jugement», a réagi le maire PS de Gonesse Jean-Pierre Blazy.
» LIRE AUSSI – EuropaCity s’imagine toujours un avenir
Ce rejet du PLU ne signifie pas, pour autant, la fin de ce projet à plus de 3 milliards d’euros. Europacity, dont l’ouverture est attendue autour de 2025, sera retardé a minima de deux ans. Le maire de Gonesse se dit «déterminé pour faire aboutir ce projet que les habitants du territoire attendent» et soutient l’implantation du métro et d’Europacity. Pour bien comprendre l’affaire, il faut revenir en 2017: la mairie de Gonesse voulait modifier son plan local d’urbanisme afin de permettre l’urbanisation d’une partie du triangle de Gonesse, aujourd’hui majoritairement composé de terres agricoles. C’est sur ce terrain que seront bâties une gare de la future ligne 17 du métro ainsi que les installations d’Europacity, le projet titanesquede plus de trois milliards d’euros porté par la société Alliages & Territoires, composé de Ceetrus, branche immobilière du groupe Auchan (ex-Immochan), et du chinois Wanda, un opérateur immobilier spécialisé dans le divertissement.
Menée entre mai et juin de la même année, l’enquête publique sur cette modification se termine par un avis consultatif défavorable de la part du commissaire en charge du dossier. Ce dernier estime que le projet d’urbanisation est «peu compatible avec la notion de développement durable», et que les objectifs d’emploi affichés sont «peu en phase avec le niveau de formation local». De plus, «le projet ne semble pas co-construit avec les différents acteurs territoriaux», et ces derniers sont aussi «partagés sur le projet d’Europacity», justifie l’auteur du document.
Opposition frontale
Contactée par Le Figaro, Alliages & Territoires rappelle que, pour l’heure, les tensions se cristallisent autour du métro du Grand Paris et de la future gare du Triangle de Gonesse. «Qu’Europacity soit là ou non, le métro sera construit», précise notre interlocuteur, qui ajoute que leur projet s’inscrit dans le temps long et ne sera bâti que plusieurs années après la gare. «Nous avons le soutien de la population locale face à une opposition qui ment sur la destruction des terres agricoles», explique-t-on. Le groupe reste donc «confiant et déterminé» pour la suite.
Cet épisode n’est que le dernier en date d’une longue suite d’oppositions féroces entre promoteurs et opposants au projet. Les deux parties s’affrontent à la fois sur un plan quasi-philosophique – quel type d’aménagement faut-il mettre en œuvre? – mais aussi sur le détail des projets dévoilés jusqu’ici. Et, à mesure que les mois passent, les tensions s’exacerbent. Les choses se sont accélérées depuis que le projet d’aménagement du triangle de Gonesse a fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique, en décembre dernier, quelques mois après une enquête publique aux conclusions favorables, en juillet.
L’horloge tourne: le début des travaux de la future gare «triangle de Gonesse» de la future ligne 17 pourrait mener à une opposition plus frontale encore. La construction de cette station rendrait en effet inévitable l’urbanisation des zones alentours, avec ou sans Europacity. «Nous sommes prêts à poursuivre les discussions», explique Bernard Loup, qui se dit ouvert à un «projet d’urbanisation si celui-ci sert réellement les habitants du territoire».Toutefois, en l’absence d’une décision concertée, «on risque de tomber dans les types de contestations physiques des «gilets jaunes» ou de Notre-Dame-des-Landes», prévient celui qui n’exclut pas de voir émerger une ZAD sur cette zone agricole. Le temps presse: les travaux pour la gare doivent débuter fin 2019.
Mais ne soyons pas bêtement « anti-Europacity », le projet répond parfaitement aux exigences du développement durable : « 7 hectares de ferme urbaine », « 100% des besoins en énergie produits sur place », et soi-disant « 11 800 emplois directs et non délocalisables en phase d’exploitation » !
Et revoilà l’argument ultime du capital, la création d’emplois ! Mais créer des emplois peut-il être une fin en soi ? Quelle connerie quand on y pense. Tu gardes mes gosses, je garde les tiens, on se paye chacun 10€ de l’heure, et hop, on a créé de l’emploi ! On travaille tous les deux à Europacity un week-end sur deux, je me diverti pendant que tu bosses, et le week-end suivant on échange. Quel progrès ! Ne devrait-on pas plutôt permettre aux français de pouvoir se divertir le week-end hors du système marchant ? Le peuple français ne devrait-il pas plutôt produire ce dont il a besoin avec le minimum de travail ? Souhaite-t-il que ses enfants s’épanouissent et développent leur créativité en pleine nature ou qu’ils s’abrutissent dans les parcs-d’attraction-centres-commerciaux ?
Jan Morvan pour le site Un peu d’air frais
Quelques images de l’horreur industrielle :